Un petit article rigolo d un journaliste russe... a lire.
Sarkozy ou le socialisme à visage humainIl suffit de relire Marx pour se rendre compte que le nouveau président est plus proche de la lettre du dogme que le socialisme de Ségolène Royal.La présidentielle est aujourd’hui passée. Elle a donné lieu à la campagne électorale la plus tendue jamais menée en France. Nicolas Sarkozy l’a emporté. A l’annonce des résultats, beaucoup commençaient déjà à parler de nouvelle défaite du socialisme. Ne serait-ce pas là une conclusion hâtive ? Certes, la candidate du Parti socialiste a vu le fauteuil présidentiel lui échapper, mais cela va-t-il pour autant entraîner des atteintes à la justice sociale – et d’ailleurs, le socialisme français actuel suit-il vraiment les principes socialistes ?
Quelle signification revêt pour les Français ce terme de “socialisme” ? Une société juste qui ne laisse pas de place à la pauvreté ni à l’inégalité, où l’Etat limite la toute-puissance du capital et soutient les populations socialement vulnérables… Mais, en fait, les tout premiers socialistes n’étaient pas favorables à un partage égal de la richesse nationale ; ils soutenaient le principe d’une répartition correspondant au travail.
“Avec le socialisme, l’ouvrier reçoit sous une certaine forme l’équivalent de la quantité de travail qu’il donne à la société sous une autre forme. Le droit de ceux qui produisent est proportionnel au travail qu’ils effectuent, et l’égalité consiste dans le fait que l’unité de mesure est identique pour tous : c’est le travail”, écrivait Karl Marx dans sa Critique du programme de Gotha. Sa conclusion était la suivante :
“Ce droit égal est un droit inégal pour un travail inégal, et donc, par nature, c’est un droit inégalitaire, comme tout droit.”Ceux qui ont voté au second tour pour Ségolène Royal sont-ils prêts à accepter cette vision ? Je n’en suis pas sûr. L’une des principales promesses de la candidate socialiste était d’augmenter le salaire minimum de 20 % et de faire passer l’allocation-chômage, dans la première année qui suit la perte d’emploi, à 90 % du dernier salaire. Or, à ce jour, c’est 52 % du PIB que la France redistribue à travers son système budgétaire ! Environ 60 % des dépenses de l’Etat servent à financer des prestations sociales. Le montant moyen de l’allocation-chômage est de 965 euros, soit 2 % de moins que le salaire minimum net ! Elle est versée en moyenne pendant vingt-deux mois. Rien d’étonnant, dès lors, à ce que 2,3 millions de personnes en état de travailler ne s’embêtent pas à chercher une activité qui serait utile à la société. Quant à ceux qui n’ont jamais travaillé un seul jour de leur vie, ils bénéficient du RMI. Bien sûr, il est difficile d’en vivre, mais c’est tout de même la solution qu’ont choisie 1,1 million de Français. En outre, depuis l’an 2000, c’est l’Etat qui finance les soins médicaux des chômeurs et des exclus.
Ces dernières années, la France est devenue un pays d’immigrés. Et si, aux Etats-Unis, seuls 7 % à 8 % des nouveaux venus s’inscrivent au chômage dans l’année suivant leur arrivée, ce taux est en France de 55 %. Evidemment, une société qui peut se permettre cela est une société très humaine, mais est-elle pour autant socialiste ? Quand les pères fondateurs du socialisme parlaient de droits de l’homme, ils n’envisageaient que le seul droit au travail – et encore, dans un contexte où l’allocation-chômage était un concept totalement inconnu. Lors de son discours d’investiture, le président John Kennedy avait déclaré :
“Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.” Cette question n’a pas bonne presse chez les socialistes français. Les droits sont depuis longtemps perçus hors de toute corrélation avec des devoirs. José Bové, l’un des douze candidats du premier tour, idole des altermondialistes, est un agriculteur raté de Millau connu pour avoir détruit un McDonald’s local. Cela lui a valu de passer quarante-quatre jours en prison avant d’être gracié. Voilà huit ans qu’il apprend aux gens à lutter pour leurs droits.
Il ne faut pas juger les résultats de la présidentielle française comme le fait aujourd’hui l’essentiel de la presse gauchisante d’Europe. Le 6 mai, les Français ont voté contre les socialistes, mais pour le socialisme. Pour un socialisme à visage humain, le visage d’un homme prêt à travailler et à gagner de l’argent en accomplissant son devoir vis-à-vis de son pays. Les Français ont voté pour les droits de ceux qui comprennent que
“le droit au travail est par nature inégalitaire, comme tout droit”. Et si Mme Royal aspire à une répartition des richesses
“en fonction des besoins de chacun”, elle n’a qu’à se dire communiste. Peut-être qu’alors son charme rapportera plus que les 2 % que la candidate du PC a recueillis au premier tour.
Vladislav Inozemtsev
Vedomosti
Source: www.courrierinternational.com
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